Dessin

J’ai vu un dessin étrange. C’est le pouvoir des images, parfois, de donner le complexe en simplicité. L’illustration me place sans gravité au fond de l’eau, je suppose un masque peut-être un tuba, pas très loin des embruns, je vois le soleil dans les jupes de l’écume au-dessus de moi, le dos des reflets scintillants, presque des parfums. Un peu plus loin est représenté un dauphin et devant lui est ajouté au crayon le cône en 3D de son cri si particulier. Mais là le cône est tranché, saucissonné, et sur la surface du rond ainsi découvert, dessinée une rosace de l’onde projetée.

J’avais l’habitude d’imaginer les courbes de côté, comme la trace de trois battements du cœur et d’un mensonge sur du papier, sans jamais penser que de face,  elles dessinaient un bouquet dense et épuré, du sens arrêté dans sa  masse à l’instant T.

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Il n’y a pas de rupture dans le vivant, pas de connu. Pas de vivant spontané, pas de communauté de minéraux rebelles et décidés. La vie se transmet, toujours, tout le temps, systématiquement, comme une onde diffractée, qui se scinde, puis se contracte.

J’ai déjà vu ces images accélérée d’une graine qui se déploie, d’une tige qui s’envole d’un vert frais et pétillant. Que verrais-je de ma loupe si je la coupe en son sommet, la crête de ses pionniers, si ce n’est une rosace ordonnée de folles cellules enthousiastes ?

Je pense : L’ADN, le noyau, serait le ton, la note, le plan de l’onde qui va, doit, pourra se propager.

Anges

Vous auriez pu me parler.
Omniscients et impotents, lâches ou pieds et poings liés. Etes-vous si nombreux pour couvrir l’humanité ? J’imagine d’autres dimensions dans lesquels j’émets en clandestin de ma conscience, naïf de mon clapot, innocent de mes tourbillons, probablement un salaud, certainement un pauvre con.
J’agis en Grec, mon ignorance me couvre, votre silence vous condamne. Vous y étiez, mais n’avez pas bougé. Spectateurs des plantes qui se tordent, qui se meurent. Moi je suis grand, je suis fort, je suis une onde faite de falaises, de pics, de crocs, d’abîmes et braises. Mais là-bas des enfants, des nouveau-nés, tant de promesses gâchées.

Je pense : Si Dieu nous a fait à son image, libres et seuls ; allez vous faire voir au spectacle de la réalité.

Fractale

Je lis : « Une figure fractale est un objet mathématique, telle une courbe ou une surface, dont la structure est invariante par changement d’échelle »

Je lis ailleurs : « Ce qui est en bas est comme ce qui est en haut, et ce qui est en haut est comme ce qui est en bas »

Je regarde ma main, ma peau, une petite plaie où je peux percevoir une infime douleur, j’y suis tout entier. Je vois une de mes cellules. Sait-elle qu’elle est moi, qu’elle est ma condition nécessaire, mais non suffisante ? Sait-elle qu’elle porte en elle l’ensemble de ma tonalité ?

Je pense : Si Dieu s’est fait homme, je devrais me faire cellule ; avec l’élan, atome ou molécule.

Interférence

Je lis : « Le phénomène d’interférence ne se produit uniquement lors de la combinaison de deux ondes de même fréquence »

Deux vagues jumelles se cognent et se fracassent pour faire ici un calme plat, un tsunami là-bas. Si je me croise au détour d’une boucle dans le carrefour du temps d’un moi présent avec celui que j’ai été, il est possible que je m’annule ou me double au hasard d’un demi-pas. Dans tous les autres temps, sans canon en stricte mesure, je serais flou dans les deux sens, décalé et brouillé, sans intuition pour lui du futur, ni pour moi repère du passé.  Mes souvenirs marqués sont ma note au carré; mes dénis et mes troubles, les instants effacés par mon onde qui se rencontre en contre-pied.

Le problème n’est plus l’autre, mais la démesure de son temps. A présent je crains l’alter ego, non plus dans l’affront de son existence, mais dans le possible accident en contretemps de sa présence, une moitié décalée trop ou pas assez de moi.

Je pense : Schopenhauer avait raison de dire la providence des enfants sur des parents opposés. On se complète, on s’attire, de cette courbe qui nous permet d’être droits.